La marche à la guerre

« Quelle puee émanoit d’iceux ! L’on croirait humey la Mär ! » Commenta un camérier tandis que l’inénarrable petit homme à la barbe taillée en pointe relatait à Wart le Chauve les derniers évènements qui agitaient le Monde. Après le Nordhalünd, c’était au tour des forces du Hutin (à la perfidie légendaire) de se ranger au côté des Svade. Le constat, cruel, s’imposait au lyrgër comme la vérole à une putain : non seulement il n’avait pas été invité à partager le pain et le sel avec Hagen mais il était, en sus, encerclé.

Il y eut bien un sot pour arguer que leurs voiles se tournaient vers le Sud et non vers les domaines vandaags mais, à grands coups de taloches, Wart lui exposa son point de vue. Les horions convainquirent durablement l’importun tout comme l’assemblée. « Mes beaulx amis, la guerre est à nos portes, accueillons-la comme il se doit ! Des esclaves pour Breda ! Un monde nouveau sera l’enjeu ! » et les braves de répondre en chœur « FOUDREE PANTOUFLE ! ». Il n’était pas question de laisser la Bête se goinfrer dans le Sud pour qu’elle revienne, grasse et forte, à l’assaut des forteresses vandaags. Partout, dans le pays, les bannerets furent chargés de lever des compagnies tandis que le Jarnlünd vomissait des armes à n’en plus finir afin de les armer. Dans toutes les cités, des artisans empennaient des flèches, sans même prendre le temps de fêter le saint lundi, pressés qu’ils étaient de les voir percer la couenne d’un soudard sigrdryrk et on y chantait à chaque rue que les temps nouveaux étaient pour demain.

Quant au lyrgër, confronté au silence du sénéchal ellandyen (qu’attendait donc l’ost royal ?), il dut tourner son regard vers l’Est sauvage. Puisqu’on l’encerclait, il se devait d’équilibrer la balance. L’on prétendait qu’au Thrasamundlünd l’émissaire svade faisait le régal des corbeaux et que des hommes s’étaient mis en tête de piller l’arrière-pays sigrdryrk. Tout déplaisant que soit le seigneur Oronte, aux gestes hantés par l’idée d’un code d’honneur qui, aux dires des oracles, jamais n’avait reçu la bénédiction d’un triton enchanteur, Wart allait devoir s’acoquiner avec le vilain. Il dépêcha donc un plénipotentiaire à Brenecht afin de tenter d’y nouer une alliance salvatrice. L’homme s’y exprima, à peu de choses près, en ces mots :

« Beaulx sire ! Je ne vous apprendrois rien si je vous disey que nos simiesques voisins arment moult piétons aux dents byen longues ! Pour d’honestissimes seigneurs il y a matière à inquiétations à gran fuisson ! Partout dans le Septentrion li gen vantent vos vertus ainsi que vos apertises d’armes.
Alors, le Vandaaglündlyrgër a déclarey « montrons nous hardis et entreprenants ! Unissons nos forces en une sainte alli et baroyons li traiteux !» et li cours a respondu « il dit bien ». Vous joindrey vous à nous ? »

Quelques jours plus tard, c’est une autre estafette, à destination du sénéchal d’Ellandy, qui fut dépêchée afin de lui réexposer une situation que son éloignement semblait lui rendre difficilement intelligible.

Citation :

Sire de Failly,

Il semblerait que vous n’ayez saisi la situation dans laquelle je me trouve. Mes ennemis sont tant à l’est qu’à l’ouest. Je ne puis, à l’heure actuelle, effectuer le moindre mouvement. Si mon ost fait un pas dans une direction, il a l’assurance de voir son arrière-garde tomber sous les coups des séditieux.

Dépêchez-moi vos gens afin que je puisse briser mon enclavement ! Ma flotte pourra assurer l’intendance et transporter le ravitaillement de vos terres à la Bredanie, afin que ni les Sygrdrirks ni les Nordhals ne puisse, dans notre dos, couper la route de nos vivres.
Notre bon roi est probablement retenu dans la forteresse d’Ivdrer, une place qui ne se prend pas aussi facilement qu’une pomme à un arbre mais que je me fais fort de faire tomber si vous me donnez le concours de vos hommes.

Respectueusement,

Le Vandaaglündlyrgër Wart.

Le messager envoyé pour Wart Vandaag arriva assez rapidement, seulement trois jours après son départ, et vint immédiatement trouver le sénéchal. Ce dernier était très occupé par la guerre imminente des nouvelles toutes plus catastrophiques les unes que les autres parvenaient chaque jour de Sybrondil. Il prit néanmoins le temps d'écouter ce que les bredaniens avaient à dire.

Ainsi, les seules alliés bredaniens étaient également en mauvaise posture et demandaient hommes et resources. Fort bien. Enguerrand de Failly fit rédiger une réponse sur le champs :

Vandaaglündlyrgër Wart,

Je comprends bien votre situation et je compatis. Mais ici, nous sommes aussi embarrassés que chez vous. Cependant, j'enverrais des hommes en bredanie ainsi que les vivres que vous m'avez demandés.

Et aussitôt dit, aussitôt fait. Le sénéchal fit envoyer 1500 hommes aux Vandaag ainsi que les ressources. Le lendemain, justement, les renforts arrivaient. Quelques 5000 hommes supplémentaires arrivèrent de toute le royaume avec de quoi tenir un siège. A présent, le sénéchal n’attendait plus que les bredaniens se manifestent.