Un avenir plus que terrifiant [PV Elestine]

Dan avait quitté les lieux, il y a à présent tellement longtemps. Le château était vide, glacial même, par moment. L'annonce d'une guerre imminente approchait, elle le savait comme le murmure dans l'air qui présageait l'arrivée de l'hiver prochain.

La reine était hantée de souvenirs, de passivité, d'attentes. Elle devait réagir mais une force agissait contre son désir de prendre les choses en mains. * Une poigne de fer, de la résolution ma pauvre Alina, ton peuple souffre de ton manque d'initiatives*

Elle était assise dans la salle du trône, non pas là où elle aurait dû en tant que souveraine mais à son ancienne place, celle où elle régnait en princesse encore bien loin des soucis actuels, de cette succession cruelle qui lui avait fait perdre un frère, un ami, un confident.

Finalement que lui restait-il? Des sujets dévoués? Oui pour certains. Des amis? Ceux qui ne voyaient pas le pouvoir, la richesse et l'opulence. La jalousie étant sur toutes les bouches, des œillades discrètes, des messes basses, elle entendait mais ne disait rien. Pourtant, elle avait bien eu une amie dans son enfance, mais la fillette avait été chassée du palais à son adolescence et depuis, plus rien.

Se maintenant le front de l'index, alors que son pouce reposait sur sa joue, l'air morose, la reine montrait triste mine. Au dehors il faisait gris, cela n'allait pas pour arranger son moral. Sa suivante la plus fidèle Eléonore, lui avait chaudement conseillé de faire un bal, un divertissement quelconque pour lui redonner un peu de baume au cœur. Alina avait trouvé l'idée intéressante et fait mander une troupe de ménestrel pour la fin de la semaine.

Les faire part de la réception seraient envoyés dès le lendemain, la reine espérait sincèrement que ses sujets seraient présents. Elle perdait chaque jour un peu plus de sa cote auprès d'eux. Et là, organiser une fête alors que les tensions entre Dinak et Alsaria ne cessaient de se renforcer permettrait de souffler un peu, de se changer les idées...ou pas.

Ainsi donc, la semaine défila, inlassablement, les mêmes tâches royales lui incombaient quotidiennement, récurrentes et ennuyantes. Elle s'y adonnait cependant avec verve et efficacité. Audience après audience, signature de registre, lecture de compte rendu et autres affaires.

Déjà la grande soirée mettait tout le palais en effervescence, la grande salle de réception étant ouverte, le cristal briqué, l'argenterie et la porcelaine de sortie. Des chandelles par millier éclairaient un peu partout, du moindre recoin à l'intérieur, aux plates bandes d'arbustes et buissons au dehors. On aurait dit un parterre étoilé où la poudreuse se mêlait avec divinité à la magie du lieu. Les domestiques courraient en tous sens pour faire de ce bal, l'un des inoubliables du moment.

Un simple instant de convivialité, où leur belle majesté serait à l'honneur et peut être un peu plus souriante que les dernières jours, semaines, mois et années.

Elestine dépassa les grilles du palais, ses compagnons s'émerveillaient devant la majesté des lieux, pour la plupart ils n'étaient encore jamais venus. Mais pour Elestine c'était différent, elle connaissait bien ces murs, même si les préparatifs de la fête leur avaient donné une nouvelle jeunesse.
Trois jours plus tôt, Norbert, le chef de la troupe avait reçu une missive de la part de la reine, celle-ci mandait leur présence pour la fin de la semaine. Il était bien évidement exclus de refuser, néanmoins cette démarche déclancha une multitude de question chez Elestine.

*Alina, pourquoi avoir demandé cette troupe en particulier? Souhaites tu me revoir ou bien est-ce notre renommée qui a décidé ton choix? Ne rêve pas ma pauvre Elestine, la reine a d'autres soucis en tête, elle t'a certainement oublié, c'était il y a si longtemps, plus d'une décennie....
De toute façon le choix de la troupe ne revient probablement pas à la reine, ce n'est qu'une coïncidence, oui, ce doit être ça, le rôle d'Alina n'est pas de convoquer les ménestrels, quelqu'un l'aura fait à sa place, quelqu'un qui ne sait pas...
Me reconnaîtra t'elle? J'ai tellement changé...... Et elle? Est elle encore souriante et pleine de joie comme lors de nos jeux d'enfant? Pourrons nous seulement nous parler? Probablement pas, elle aura ses obligations et je n'en fais pas partie. C'est dommage quand même, nous étions si proche. Et la manière dont nous nous sommes quitté c'est vraiment triste, je n'ai même pas pu m'excuser pour ce qui s'est passé la dernière fois....*

Les pensés d'Elestine furent du même ordre depuis l'arrivée de la missive, morose, mais malgré tout elle essayait de garder une lueur d'espérance, peut être qu'un miracle se produirait et qu'elle retrouverait son amie. Maintenant plus que jamais, les souvenirs de son enfance lui revenaient, elle suivit ses compagnons dans les quartiers des serviteurs où une place leur avait été réservée pour qu'ils puissent mettre leurs affaires et se préparer pour la représentation.

La cour commençait à se remplir d'innombrables carrosses de riches manufactures et un peu moins, selon les rangs qui s'attroupaient comme des petits soldats, la seule différence étant leurs jacasseries incessantes.

Alina observait du haut de sa chambre, par la fenêtre les tâches de luminosité des chandelles éclairant des petits bouts de parterre.

*Au moins, il y aura du monde, je pourrai me glisser dans le décor sans trop de mal*

Oui, la reine était passée mettre dans l'art de disparaitre, de meubler tant la passivité l'avait rongée ces dernières années. Ses domestiques la rappelèrent pour terminer de nouer, lacer sa robe complexe et saillante. Elle avait choisi un bleu foncé à la dentelle d'un blanc écru. Devant le miroir qui trônait dans la pièce, elle se trouvait encore bien jolie, mais les soucis et la tristesse avaient creusé ses traits de manière inquiétante.

On frappa deux coups à la porte.

- Entrez

Un page s'inclina respectueusement, une fois que la porte fut ouverte par la servante

- Majesté, la troupe de ménestrel est arrivée, peut être souhaiteriez vous les saluer avant qu'ils ne prennent leurs aises sur le devant de la scène?

- Tu as raison, je m'y presse de ce pas, Gavin, offre leur de quoi se sustenter avant que je n'arrive.

Le jeune homme disparut et Alina prépara sa personne, refusant qu'on la charge de trop en froufrous et autres bijoux dont le poids était toujours exaspérant. Elle déambula dans les couloirs, la garde était fièrement alignée, les domestiques avaient déserté, probablement tous sur le pied de guerre dans la grande salle ou en cuisine.
Elle avait fait ouvrir quelques chambres, au cas ou certains de ses sujets ne vivant pas au château, se retrouvent ivre mort avant la fin de la soirée.

La souveraine arriva enfin dans le petit salon où la troupe avait pris quartier.

- Je vous souhaite la bienvenue au palais de Dénaros et vous remercie chaleureusement d'avoir répondu présent à mon invitation dit-elle majestueusement, d'une voix calme, offrant un sourire à la bande qui se tenait devant ses yeux.

Elle les détailla un peu, de beaux costumes, ils étaient tous agréables au regard, musclés, élancés. Il y avait des femmes dans leur rang, probablement des diseuses de bonne aventure ou autres. Elle ne s'attarda pas spécialement, pourtant l'une d'elle attira son attention, quelque chose d'étrange, un souvenir vague.

* Non ce n'était pas possible*

Mais déjà ses devoirs la rappelaient à l'ordre, ses invités attendaient. Alina inclina légèrement la tête avant de quitter la pièce et de laisser ses interrogations en suspend pour aller ouvrir le bal.

Les quartiers dans lesquels on conduisit la troupe étaient appelé le « petit salon », mais ce lieu n’avait de petit que le nom aux yeux des ménestrels. Elestine elle-même fut surprise de la dimension de la pièce, bien sur cela n’avait rien a voir avec la taille que pouvaient avoir les chambres royales mais le salon était spacieux, et les gens du voyage n’étaient pas habitués a être accueillit avec autant d’égards, Elestine cru y reconnaître l’attention particulière et le grand coeur de la reine. De grands meubles étaient à leurs dispositions pour y déposer leurs vêtements, des miroirs accrochés aux murs leur permettaient de s’apprêter et des paravents disposés dans les coins leur permettaient de se changer à l’abri des regards. Une table basse trônait au milieu de la salle, entourée par de confortables fauteuils.
Dés qu’ils arrivèrent, ils s’empressèrent de s’habiller, sortant leur plus belles tenues pour faire honneur à la fête, durant tout le voyage qui les mena à Dénaros ils avaient répétés sans relâche pour être fin prêt, aujourd’hui était un grand jour et s’ils voulaient s’illustrer devant la cours, aucun faux pas ne leur serait permis. L’atmosphère était pesante, le stresse leur nouant de plus en plus l’estomac, ce n’était pourtant pas leur première représentation, mais jouer devant la reine était inédit.

Ils finissaient de peaufiner leurs costumes et maquillages quand un page arriva, un plateau contenant boissons et nourritures dans chaque main qu’il posa sur la table basse.
Sa majesté la reine vous offre ses quelques mets, elle viendra dans quelques instants pour vous saluer avant l’ouverture du bal et votre entrée en scène.

Il inclina respectueusement la tête et reparti comme il était venu.

Ses paroles déclenchèrent une effervescence immédiate, chaque membre de la troupe se mit à courir dans la salle, qui cherchant un peigne, qui réajustant sa coiffure… Elestine, elle resta paralysée.
*Alina va venir, elle va se trouver à deux pas de moi, est ce qu’elle va me reconnaître…*
Toutes les pensées qu’elle avait eut revinrent la hanter, tant de question, de doutes, d’espoir, elle n’eut guère le temps de s’y perdre bien longtemps, car déjà la porte s’ouvrait sur la reine Alina Azyrith.

En deux secondes, tous les membres de la troupe s’alignèrent, ils faisaient un bel ensemble, chacun vêtu d’une couleur différente : Rouge, Orange, Jaune, Vert, Bleu, Indigo, Violet, ils étaient sept, alignés selon leur couleur pour former un arc en ciel, nom de leur troupe et symbole de leur renommée. Quand la reine fut face à ceux, d’un seul mouvement, toute la troupe s’inclina dans une profonde révérence. Leur marques de respect n’étaient ceste pas aussi raffinée que celles des nobles de la cours, mais elles ne manquaient pas d’élégance.

Alina prit alors la parole, de sa voix fraiche et mélodieuse elles leurs souhaita la bienvenu, Nobert la remercia pour sa visite et pour l’immense honneur qu’elle leur faisait en leur permettant de la divertir elle et ses convives.

Elestine regarda sa reine qui fut aussi son amie et ne pu s’empêcher de remarquer a quel point elle avait changé. Si la reine remarqua quoi que ce soit la concernant, elle n’en montra aucun signe.

*Il y a deux possibilité pour expliquer son manque de réaction, soit elle m’a reconnue et je ne représente plus rien pour elle, soit elle ignore qui je suis et elle m’aurait fait un signe si elle m’avait reconnue. Mais je ne dois pas m’inquiéter, je sais exactement comment faire pour que tu te souviennes de moi Alina, cette chanson, si cher a ton cœur, ce soir, rien que pour toi, je la chanterai.*

Déjà la reine s’en allait et après un court instant de préparation l’arc en ciel quitta a son tour le petit salon pour commencer sa représentation dans la salle de réception.

Quelque chose gênait la reine dans cette rencontre, la troupe était magnifique, l'Arc en ciel tout à fait réussi et les costumes somptueux. Elle devrait remercier Igen son ministre de la culture et des spectacles, dans la soirée.

Alina pouvait déjà entendre le brouhaha dans la grande salle de réception, il devait y avoir du monde, tant mieux, son peuple n'était pas encore assez déprimé pour refuser de festoyer. C'était une bonne nouvelle, après tout, cela voulait dire que malgré la guerre qui grondait en Yarkol et un peu partout en Ellandy et Dinak, ils lui faisaient confiance et son armée tenait bon aux frontières de son vaste empire.
Juste ce soir, elle s'accorderait un peu de paix, juste une fois, de la légèreté....et cette jeune femme, oui, son visage, elle la connaissait, une amie?

- Mes seigneurs, damoiseaux et damoiselles, veuillez faire éloge et respect à votre souveraine, la reine Alina

Voila que portait déjà la voix de l'annonceur, son entrée était imminente et la lumière éblouissante du grand lustre de cristal fut aveuglante. La jeune femme, d'une grande beauté était acclamée par les représentants de bonnes familles de chacun des comtés, duchés... Des courbettes avec plus ou moins de grâce, la reine s'avança et les salua un par un, prenant des nouvelles de leur quotidien.

Il était agréable de voir un peu de monde, enfin si plus de deux cents personnes consistaient en un peu...Quelques amis proches, qu'elle n'avait plus revus depuis longtemps. Par sa faute, exclusivement, se retirer du monde et ne plus donner signe de vie, n'était pas très bien perçut dans la haute société. Pourtant, ils ne l'en tinrent aucun reproche, encore un soulagement.

Enfin, une petite heure plus tard, elle put gagner sa place à la grande table formant un U imposant. Sa chaise fut repousser, elle invita ses convives à choisir selon leurs affinités leur emplacement pour le souper.

- Je suis heureuse de vous revoir tous, le temps et la guerre vous ont fait grâce pour certains et beaucoup moins pour d'autres. Afin d'apaiser les esprits et de nous retrouver dans un moment de convivialité, simple, je vous souhaite un excellent repas et un bon divertissement.

La reine s'assit alors qu'atours d'elle s'affairait déjà un nombre indéfinissable de serviteurs, apportant outre de vin, d'hydromel, de jus de fruit ou de bière, versant à volonté, la couleur des différents liquides au goût exquis, dans les verres des seigneurs et dames. Les conversations faisaient rage et bourdonnaient aux oreilles avec un son délicieux de vie retrouver. A sa droite son conseiller, il était certes plus vieux que sa personne mais se révéler être un judicieux stratège, perspicace, curieux, calculateur et innovateur, il y avait une bonne relation entre eux.

Les plats furent déposés dans des coupes d'or, des plateaux d'argent, débordant de mets succulents, porc, rôti, bœuf, agneau, des légumes de saison, pommes de terre, potiron. Des miches de pain, du fromage emplissaient la longue table, où toutes sortes de mains, de doigts, bijouteux, manucurés ou travailleur, piochaient au gré de leurs envies et préférences.

L'annonceur reprit la parole au centre de la pièce, frappant de sa canne le sol de marbre, large mosaïque représentant le blason de la famille royale, pour imposer le silence.

- Veuillez faire honneur à la troupe de l'Arc en ciel qui a fait le voyage pour divertir sa royale majesté et ses heureux invités

La troupe colorée entra en scène ayant toute l'attention de l'assemblée qui mastiquait et se remplissait la panse. La musique prit place aux discussions en bruit de fond.

Alina eut tout le loisir de contempler les exploits et cabrioles effectués devant ses yeux, applaudissant par moment, souriant, radieuse, cela lui faisait le plus grand bien et pour un instant, elle en oublia Dan et sa triste existence.

Dés qu'ils furent annoncés, les membres de l'arc en ciel s'avancèrent, tout d'abord ce fut Malvina qui se présenta, son costume violet surmonté de clochettes et sa petite taille la faisait ressembler à un lutin. Agée d'à peine 15 ans, elle était la cadette de la troupe, sa spécialité, comme s'en rendirent rapidement comptes les spectateurs était l'acrobatie, elle entra en scène par une roue, suivit d'un salto arrière. Pendant qu'elle sautait et rebondissait partout, deux hommes, Mirtan et Centan, des jumeaux, firent leur entrée. Ils étaient semblables en tous points si ce n'est la couleur de leurs vêtements, l'un d'un indigo profond, l'autre d'un bleu clair pouvant faire concurrence au ciel. Accrochés à leurs dos, divers instruments à vent et à cordes trahissaient leurs métiers de musiciens tandis qu'ils portaient de lourds poteaux de métal joint à leurs extrémités par une corde de 6m de long. Pendant qu’ils installaient le matériel, Geoffrin fit son apparition, il poussait un petit chariot sur lequel une armature cubique d’environ 1m50 de coté, était posée. Sur les cotés, des rideaux de velours vert assortis à son costume étaient suspendus. Quand il arriva au centre de la scène, il tira les rideaux de sorte que personne ne puisse voir l’intérieur du cube, quelques instants après il les rouvrit. Camali se tenait là, alors que quelques secondes auparavant il n’y avait personne. La jeune femme avait une vingtaine d’année, mais le plus surprenant était sa position. Seules ses mains touchées le sol, son dos était tourné vers le plafond, ses jambes remontaient vers ses épaules, ses pieds sous son menton, elle pouvait presque poser ses fesses sur sa tête. Tout sourire elle fit un signe de tête aux spectateurs subjugués, mais déjà le magicien faisait tournoyer son chariot rendant flou l’image de la contorsionniste qui disparut dans mélange de couleurs jaunes et vertes. Les invités les plus proches de la scène eurent subitement chaud, un homme d’âge mur, la quarantaine, s’approchait d’eux, on aurait pu le croire sorti des enfers tant il semblait entouré de flamme. Grand, robuste et fort il était taillé dans un rock, tout chez lui rappelait la puissance du feu, de son costume orange aux boules enflammées qu’il faisait tourner autour de lui. Il fit habilement passer ses accessoires dans sa main droite et, de la gauche prit une bouteille accrochée à sa ceinture, il la porta à ses lèvres. Alors, tel un dragon, Norbert crachat une longue langue de flamme en direction de la porte dans une explosion de chaleur. Ceux qui n’avaient pas fermé les yeux de surprise virent une ombre apparaître derrière les flammes, lorsque celles-ci se tarirent, Elestine était en train de danser au milieu de l’espace réservé au spectacle. Elle se déhanchait, virevoltait dans sa somptueuse robe rouge serti de grelots.

Enfin la troupe était au complet sur scène, comme ils l’avaient fait précédemment devant la reine, ils s’alignèrent et s’inclinèrent devant les convives. Après la petite démonstration des talents qu’ils venaient de faire, l’arc en ciel débuta sa représentation. Ils avaient décidé de commencer doucement par une chanson, un canon qu’ils avaient préparé uniquement pour cette occasion. Il s’agissait qu’une mélodie très connu en Alsaria, un hommage au souverain. En réalité cette chanson avait était inventée depuis plusieurs génération, et chaque fois d’un nouveau roi montait sur le trône les paroles étaient adaptées pour lui correspondre le mieux possible et vanter ses mérites. Lorsque la voix d’Elestine s’éleva, haute et claire, elle chanta la beauté de la reine, sa gentillesse, son humanité. Une autre version de la mélodie existait, les bohémiens l’avaient entendu à Criméa, mais la reine n’y était pas mentionnée avec autant de louange. Si un jour les spectateurs entendraient cette version, ce ne serait pas de la bouche d’un des membres de l’arc en ciel…

Une fois la chanson terminée, ils enchainèrent les numéros, tous plus impressionnants les uns que les autres. Discrètement Elestine regardait la reine, lorsqu’elle était venue les saluer, la chanteuse avait trouvé que son ancienne amie ne semblait pas en pleine forme, soucieuse et triste même si elle ne le montrait pas. Etait-ce leur amitié d’enfant qui lui permettait de lire encore en elle, ou bien juste une impression ? En l’observant maintenant Elestine pensa s’être trompée, Alina rayonnait, elle était gaie et semblait heureuse.

Le spectacle qui s'offrait à la reine était tout bonnement époustouflant, haut en couleur et chacun des ménestrels était sans doute très doué dans sa catégorie, son art.

La chanson flottait encore dans l'air, Alina y repensa, se désintéressant un peu à regret des autres membres de la troupe pour se concentrer sur la chanteuse, une bohémienne? Sans doute pas, son teint ne s'y prêtait pas et puis ces paroles, non, était-ce possible? Encore une fois la solitude ne lui jouait-elle pas de mauvais tour?

Son intérêt revient vite à la discussion qui l'entourait, alors que la souveraine portait de temps à autre son regard clair sur la jeune femme aux cheveux sombres, à l'air si familier. Finalement, elle demanda à son cher premier ministre un entretien avec la demoiselle, au plus tôt après le spectacle, dès que les convives eurent quittés les lieux, ou encore s'être couchés.

La soirée battait son plein mais déjà Alina n'y participait plus vraiment, un instant, elle avait parut heureusement, la seconde d'après tourmentée. Finalement, elle préféra se retirer discrètement pour aller prendre l'air, laissant les choses et évènements se dérouler dans la grande salle de réception jusqu'au couvre feu...

Le confident de la reine octroya la tâche d'aborder la jeune ménestrel par le biais d'Éléonore, la dame de compagnie de sa majesté. Ce que fit la servante dès que les invités disparaissaient au compte gouttes, certains dans des carrosses luxueux, d'autres montant dans les étages précédaient de guides, une bougie en main ouvrant le chemin dans les ailes immenses de la vaste demeure.

"Mademoiselle" appela la domestique tout en entrant dans le petit salon qui était mis à disposition des forains pour leurs aises. Ne voulant s'avancer davantage, certains étant entrain de se changer, elle rougit violemment et se retourna.
"Je cherche la jeune chanteuse, la reine la demande expressément" s'écria t-elle pour se faire entendre

Restant toujours de dos, elle qui était encore vierge et le serait pour toujours ayant fait ses vœux pour servir au mieux sa souveraine sans jamais détourner son regard d'elle pour une quelconque tentation.
Dès pas, la demoiselle devait sans doute approcher, Eleonore pressa le pas soudainement pour sortir et laisser derrière elle la porte entrouverte pour la guider jusqu'au bureau d'Alina, là où elle avait l'habitude de s'entretenir, certes pas à une heure aussi tardive.

Installer dans la pièce aussi large que haute, une grande cheminée chauffant abondamment, un tapis recouvrant le parquet, une bibliothèque aux étagères chargées de lourds ouvrages, des chandelles et des bougeoirs recouvrant les meubles de toutes sortes de bois précieux. Une table étant disposée un peu plus loin pour les conseils demandant un huit clos.
Alina n'aimait pas particulièrement cette endroit, il était encore trop hanté de la présence de son père, tout représentant la masculinité, elle n'y avait rien changé, elle ne voulait pas s'approprier ce lieu.
Autant, le château avait subit quelques modifications pour le mettre plus à son image, autant certaines pièces avaient conservé les épreuves du passé.

Que devait-elle penser et si c'était Elestine? Après tout ce temps, elle s'était souvent reprochée que ce fut de sa faute tout ça, son père ayant sévit pour la protéger, alors qu'elle avait suivit la jeune fille de son plein gré. Elle ne tarderait plus à savoir de toute façon, le calme commençant à régnait dans les murs de Dénaros.

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