Le calme après la tempête

[Suite de L'apprentissage commence par la découverte]

Le petit groupe arriva bientôt à l'hospice. Schneizel ouvrait la marche d'un pas rapide. Il n'avait dit mot depuis qu'ils avaient quitté le couloir. Il était perdu dans ses pensées, se repassant la trame des évènements mentalement et tentant de trouver un sens à la soudaine perte de sang froid d'Alys. Ce qu'elle avait fait l'avait déçu et blessé, mais il était persuadé qu'il devait y avoir une raison à tout cela. Les temps étaient durs, certes, mais tout de même pas assez pour l'ébranler ainsi. Non, il devait y avoir autre chose, autre chose qu'il ignorait, autre chose dont elle ne lui avait pas parlé...

Schneizel guida Key près d'une paillasse libre et lui fit signe de s'asseoir avant de héler un apothicaire. Ce dernier, s'approcha de l'apprenti et lui fit pivoter la tête sur le côté pour examiner la blessure.

"Hmm... Une coupure nette et peu profonde... Vous avez de la chance, quelques millimètres de plus, et..."

"Vous pouvez vous en occuper?"

"Bien sûr, ce ne sera pas long. Comment est-ce arrivé?"

"Contentez vous de panser cette plaie."

répliqua Schneizel, un peu plus brusquement qu'il ne l'aurait voulu. Cet homme était étranger à cette histoire, il n'avait pas à subir sa frustration. Pour autant il ne fallait pas que l'incident s'ébruite. Il suffirait d'une rumeur pour miner le moral des habitants de l'île, et l'Organisation n'avait vraiment pas besoin de ça.
Le guérisseur s'attela à son office sans autre commentaire. Schneizel espéra qu'il ne l'avait pas trop mal pris. La plaie fut désinfectée, puis bandée et le médecin retourna à ses occupations.
Le Mercenaire recentra son attention sur son apprenti.

"Ca va?"

demanda t il. Il ne parlait pas uniquement de la blessure. Il espérait que son demi-elfe de disciple n'ait pas été trop choqué par sa mésaventure.

"Ce n'est pas vraiment comme cela que j'avais imaginé ton premier jour au sein du repaire..."

ironisa t il, autant pour faire sourire Key que pour décompresser lui-même. Alors qu'il prononçait ces mots, son regard tomba sur le bijou que le demi-elfe portait à l'oreille droite. Cette pierre lui avait semblé étrangement familière dès sa première rencontre avec le jeune noble, mais il avait fini par ne plus y penser. Mais à présent que l'apothicaire avait dégagé les cheveux de son apprenti en arrière pour poser son bandage, elle apparaissait plus que jamais. Un souvenir frappa Schneizel de plein fouet, le tétanisant sur place. Il venait de se souvenir où il avait déjà vu cette boucle d'oreille, ce bijou unique...

Son regard quitta l'apprenti pour se poser sur Ciara. Il s'inquiétait de savoir si elle avait perçu son trouble mais réalisa très vite qu'elle ne pourrait que le remarquer si il continuait à la dévisager ainsi. Aussi détourna t il de nouveau les yeux, les posant à nouveau sur Key. Il savait que son geste avait été purement irrationnel, tout cela était de l'histoire ancienne. Pourtant, ce n'était pas quelques chose qu'il aurait révélé de gaieté de coeur, surtout à Ciara, surtout après tant d'années de secret...

"Dis moi, Key. D'où te vient cette boucle d'oreille?"

demanda t il, parvenant à peine à empêcher sa voix de trembler. A peine eut il parlé qu'il se maudit d'avoir ouvert la bouche. Ce n'était vraiment ni le moment, ni l'endroit pour cela! Décidément, il devait être plus ébranlé qu'il ne l'avait cru...

Le chemin vers l’hospice fut des plus calmes, un peu trop calme. Schneizel ouvrait la marche sans dire un mot. Le suivait, Key, son apprenti blessé. Ciara et Alys fermaient la marche. On aurait presque dit un cortège macabre. Les deux Dominantes, un Dominant en devenir, et un blessé. De quoi faire retourner bon nombre de Mercenaire sur leur passage. L’interrogation se lisait sur ces visages tannés par l’effort, la fatigue et les combats perpétuels. La mine toujours fermée, Ciara faisait tant bien que mal taire leurs murmures d’un regard froid et pénétrant.

Que diraient ils si ils apprenaient que les deux Dominantes avaient « fait mumuse » avec un tout jeune apprenti, et pas n’importe lequel ! Celui de Schneizel Denka, ancien apprenti du Dominant Callan, Mercenaire solitaire mais bon. Et même que l’une d’elle avait blessé ce même apprenti. Cette mésaventure était à oublier le plus vite possible.

Ciara entra d’un pas trainant dans l’hospice, où, quelques semaines plus tôt elle avait aussi conduit Galaad, tout jeune apprenti aussi. Et maintenant il vagabondait. Elle l’avait perdu, mais lui faisait confiance pour qu’il la retrouve un jour. Enfin, c’était ce dont elle se convainquait. Qu’adviendrait-il si elle venait aussi à échouer dans l’apprentissage de Galaad ? Le dicton disait bien « jamais deux sans trois », et cela revenait régulièrement à l’esprit de la Dominante. Et voyant là Key allongé, un médecin près de lui, elle ne faisait qu’y repenser.

Schneizel avait fait taire le questionnement du guérisseur d’une phrase simple et sans détour. Il avait vraiment l’étoffe d’un Dominant, bien plus qu’elle. Elle qui s’enfermait sans cesse dans un mutisme maladif quand il s’agit de ses ressentis et émotions. Rien, elle ne disait rien alors qu’elle fixait avec attention les gestes du praticien pour panser la plaie malheureuse du pauvre Key. Lui aussi avait du potentiel et pourrait même devenir un grand Mercenaire.

-Dominante Ciara…

Elle sursauta légèrement. Le médecin avait fini son ouvrage et s’était approché d’elle sans qu’elle s’en rende compte, trop perdue dans ses pensées. Il n’avait pas parlé fort, mais elle fut tout de même surprise. Voyant qu’il s’apprêtait à lui poser des questions sur sa présence ici avec Alys, elle parla avant lui :

-Passez votre chemin, ce malheureux a juste manqué de chance. Il n’y a rien là d’une affaire d’état.

Bras croisés, elle déporta son regard et son attention sur Schneizel et Key, et elle s’en approcha. Plus de colère apparente, moins de tension affichée sur son visage, un pouls plus régulier. Ciara était étrangement calme et sereine. Peut être était ce du à l’endroit, un des plus reposants du repaire. Les sons étaient étouffés, on ne parlait ici que par des chuchotements. Le regard de Ciara croisa soudainement celui de Schneizel. C’était un regard étrangement perdu, trouble. La Dominante fronça les sourcils à la fin de cet instant de gêne. Que pensait son ami au moment où il avait si brusquement détourné son regard d’elle.

-Dis-moi, Key. D’où te vient cette boucle d’oreille ?

Aussitôt, le regard de Ciara se porta sur les oreilles pointues de Key, dont l’une d’elle était ornée d’un bijou de belle et bonne facture. La voix de Schneizel n’était pas tout à fait la même. Mais Ciara n’arrivait pas à voir le rapport qu’il y avait entre le regard troublé qu’il venait de lui porter et cette question somme toute incongrue.

Dernière édition par Key Watson le Jeu 23 Sep 2010 - 0:04, édité 1 fois

Key se laissait guider par son maître. Il ne pipait mot, le son des bottes sur le sol froid de pierre, qui se répercutait dans le couloir, prodiguait une ambiance inquiétante. Schneizel le devançait et Ciara était juste derrière lui, pourtant il distinguait nettement une quatrième personne parmi les bruits de pas. Tournant la tête discrètement, il entrevit, plus loin, la silhouette de la femme qui l’avait mutilé. Un fin sourire s’étira sur ses lèvres jusqu'à ce qu’ils atteignent l’hospice.

A peine arrivé, le Mercenaire le fit asseoir et un guérisseur le manipula, dégageant ses cheveux pour mieux le laisse accéder à la plaie. Curieux, il commença a lui poser des questions, Ouvrant la bouche pour lui répondre, Schneizel le devança et il la referma sans un bruit tel un poisson. Pour autant il lui en était reconnaissant de répondre à sa place, il se voyait mal expliquer à l’apothicaire les circonstances de cette blessure.

Tandis que le médecin s’acharnait a lui désinfecté la plaie et à le panser, lui arrachant des grimaces de douleur passagères. Il avait remarqué le ton sans appel de son maître répondant au pauvre homme. Il savait décidément bien diriger les hommes, même Ciara et Alys le respectait, ça se voyait dans leur maintien et leur façon de s’adresser a lui. Il aimait plutôt ça, avoir un instructeur respecté et peut être même influent parmi les Mercenaire avait quelque chose de gratifiant.

« Ça va, ne vous en faite pas. Disons que j’aurai déjà une certaine réputation : L’apprenti qui a perdu son maître, c’était fait rattraper par les dominantes, les a mis en rogne et qui a réussit a s’en sortir malgré quelques blessures.
Ça pourrait être pire et puis cette journée à été des plus intéressantes! »

Key prenait toute cette histoire avec humour même s’il se doutait que cette nuit tout cela reviendrai le travailler. En attendant il préférait pensé a autre chose. Ruminer n’était pas dans sa nature. Tandis qu’il parlait, il entrevit Ciara remercier le médecin. Elle aussi dégageait quelque chose qui poussait généralement les gens a ne pas la contredire. Pas étonnant avec ça qu’elle soit devenu Dominante.

Soudain son mentor détourna le regard pour le posé sur Ciara, Key suivant le mouvement, repéra Alys non loin. Elle les avait suivit mais était resté silencieuse depuis. L’apprenti soupira, lui non plus n’avait pas imaginé comme ça son premier jour au sein du repaire.
Brusquement il fut tiré de ses pensés par la voix tremblante de Schneizel. Le jeune homme le dévisagea avant de lui répondre calmement, question étrange en de tel circonstance.

« Je l’ai depuis toujours, c’est la seule chose qui me rattache à ma famille biologique, enfin je suppose. Pourquoi une telle question ? »

Machinalement, il toucha la pierre bleu du bout des doigts. Ce bijoux était la seul chose qu’il avait toujours possédé. Il espérait que grâce a ça , sa famille le retrouverai mais sans succès. L’une des choses auquel il tenait le plus dans sa vie.

Durant toute la marche, Alys était restée murée dans son silence. Un silence qu’elle avait gardé depuis l’instant où elle avait prit pleinement conscience de ses actes envers Key. Un silence volontaire. Qui en était presque pesant. Pour autant, elle ne s’en plaignait pas. Lorsqu’elle avait rejoints le reste du groupe, on ne lui avait posé aucune question. Bavardages futiles, voilà tout.
Cependant, elle n’aimait guère les coups d’œil suspicieux que les autres Mercenaires leurs portaient sur leur passage. Mais le regard seul de Ciara suffisait. Rarement, elle devait ouvrir les lèvres, et si tel était le cas, c’était pour les faire taire.
Cette journée s'annoncait bien malheureusement sous le signe de la mésaventure et de la morosité…

Coupant par les artères principales, ils parvinrent assez vite à l’hospice. Malgré tout, le sang avait déjà commencé à sécher. On prit alors soin du disciple, désinfectant et pansant sa plaie, avec une minutieuse attention. Certainement parce que son maître était quelqu'un de réputé qu'on prennait tant garre à son protégé. Pour autant, elle essaya de ne pas trop se poser de question? Ca vallait mieux.
Bien qu’elle porta un bref regard vers Key durant la pratique, Alys resta presque impassible à ce qui se passait autour d’elle le reste du temps. Ne guettant que vaguement les questions posées et rapidement écartées par ses amis, la Dominante restait bras croisés, dos au mur, une jambe légèrement repliée.
Ses yeux se fermant à peine, un pâle sourire étira ses lèvres lorsque Ciara parla « de manquer de chance ». Ça oui, il avait vraiment était malchanceux sur ce coup là. Tomber sur deux Dominantes, son premier jour au repaire, et les froisser si facilement… Il y avait de quoi se questionner sur cette folie du destin. D’autant plus que, sans les connaître, il avait vite trouvait des failles dans leur carapace de maîtresse du repaire.

Bruissement. Du regard, la jeune Dominante suivit Ciara quitter sa place et se diriger vers le duo maître-apprenti que formaient Schneizel et Key. Alys, quant à elle, ne quitta pas sa place. Bien qu’ils ne fassent que chuchoter, le silence était tel qu’elle entendait très bien la conversation de là où elle se trouvait. Pas besoin de se déplacer.
Il était également raison d’une certaine gêne. Elle préférait garder ses distances vis-à-vis de Key. Surtout en présence de Schneizel. Elle n’était pas dupe, elle savait qu’elle avait blessé le maître de la même manière que l’apprenti. Sauf que pour Schneizel, le coup était porté au cœur. Et dans sa dignité. Une blessure qui, venant d’une amie comme elle, était d’autant plus difficilement supportable.
La brunette ne restait que pour s’assurer que le disciple n’était pas trop amoché et que l’on s’occuperait bien de lui. Mais maintenant que ses doutes étaient écartés, pourquoi restait-elle encore parmi eux ? Expirant brusquement, elle se dit qu’il y avait encore quelque chose à faire. S’excuser peut-être ? Elle ne l’avait toujours pas fait. Et n’était pas prête à le faire…

Ses yeux ambrés se posèrent sur l’apprenti, dont deux regards inquisiteurs le fixaient déjà. Le pauvre ne devait plus être très à l’aise maintenant. A la réponse donné par celui-ci, par rapport à la boucle d’oreille qui intrigué Schneizel, Alys ne vit pas tout de suite la réaction de ses compagnons. Mais pour sa part, elle porta machinalement sa main à la bague de Selana. Aucun lien biologique entre elles. Et pourtant une intense relation les avait rapprochées. Plus grande encore que celle pour sa véritable famille. Qu’elle avait totalement renié…
Des quelques mots de Key, elle en apprit un peu plus sur lui. Tout laisser croire, de par ses propos, qu’il n’avait pas connu sa famille d’origine. Qu’il ignorait tout des siens. Et pourtant… Il était bien noble, non ? Il pouvait y avoir bien des raisons à cela. Mais… Fronçant les sourcils, elle resta attentive à cette discussion qui titillait sa curiosité.

Schneizel fut soulagé de voir que Key semblait avoir plutôt bien pris les choses. Il arrivait même à en plaisanter. C'était une bonne chose qu'il ait le moral et puisse réagir avec entrain après tout cela.

Un coup d'oeil vers Ciara apprit au Mercenaire que l'apothicaire avait tenté de glaner des informations auprès de la Dominante. Fort heureusement, cette dernière, tout comme Schneizel, avait refusé tout commentaire. La visite de Key à l'hospice accompagné de Schneizel et des deux Dominantes était un évènement trop inhabituel pour ne pas être remarqué, mais, tant que les Mercenaires ne pouvaient s'en tenir qu'à quelques conjectures, cela n'aurait pas de répercussions trop importantes. La seule chose que cela pourrait susciter serait une curiosité excessive à propos de l'apprenti. Si Key espérait passer inaperçu au sein du repaire, il risquait d'être déçu. Mais Schneizel était persuadé que ça ne durerait pas, quoi qu'il advienne.

Le jeune homme remarqua qu'Alys s'était installée en retrait. Elle avait du les suivre. Pour quelle raison? Schneizel n'en avait aucune idée. Pour s'excuser? L'hypothèse n'était pas particulièrement crédible. En tout cas, il était au moins certain que cette démarche n'avait rien de belliqueux. Si elle avait voulu s'en prendre à nouveau à son apprenti, elle ne l'aurait pas fait aussi ouvertement. Scheizel hésita un moment à aller lui parler mais préféra finalement renoncer. L'incident était encore trop frais. Il n'était pas sûr de pouvoir garder son calme et il n'était pas sûr qu'elle y arriverait non plus. Un autre esclandre n'aurait rien donné de bon. Il valait mieux laisser au temps le soin de leur faire prendre un peu de distance sur les évènements de cette journée. Schneizel n'envisageait pas une seconde de rester fâché durablement avec elle, mais la réconciliation attendrait pour le moment.

Puis vint la boucle d'oreille. Ce bijou unique qu'il connaissait pourtant déjà si bien. Le Mercenaire, pourtant quasi-inébranlable d'ordinaire, avait perdu pied durant une poignée de secondes. Cette maudite question lui avait échappé, et voilà que Key lui donnait la pire des réponses possibles. Schneizel en comprit les implications en un éclair, des implications qui lui donnèrent le vertige. De vieux souvenirs remontèrent à la surface. Elestine...son ancien amour, son plus grand échec. Il l'avait renvoyée à sa vie d'avant, l'avait condamnée à respirer la laytis... Il n'en avait jamais parlé à qui que ce soit, et voilà que Key pour qui il avait de nombreux projets ramenait à lui les démons de son passé. Il allait devoir lui en parler. Si ce qu'il supposait était juste, il n'avait pas le droit de lui cacher la vérité, mais ce n'était encore ni l'heure, ni le lieu d'en discuter.

"J'ai cru reconnaître ce bijou durant un instant, mais à y regarder de plus près, je pense m'être fourvoyé. Enfin, c'est sans importance pour le moment."

déclara t il, ayant retrouvé son aplomb. Mentir lui écorchait la gorge, mais avait il d'autres choix? Ne pas le faire l'aurait sûrement contraint à dévoiler l'entière vérité et il était hors de question qu'il le fasse devant qui que ce soit d'autre que son apprenti.

"Je te laisse le reste de la journée pour te reposer si tu le désire. Nous pourrons reprendre la visite ultérieurement."

proposa t il à son disciple. Si ce dernier acceptait l'offre, il avait l'intention de demander à Ciara de l'informer des dernières nouvelles en provenance des trois royaumes afin de rattraper son retard du aux trois mois d'entraînement qu'il avait fait subir à Key en Alsaria.

Sujet: Re: Le calme après la tempête Dim 12 Sep 2010 - 23:17

Schneizel avait balayé cet instant de trouble, cette question déplacée par rapport à la situation, comme on pouvait retirer une poussière de sa veste. Et pourtant, Ciara ressentait bien que cette boucle d’oreille avait perturbé Schneizel. C’était sur, il ne voulait pas en parler, mais Ciara était résolue à le faire parler si ce trouble persistait. Quoi qu’il en soit, ce ne serait pas maintenant qu’elle relancerait le sujet. La Dominante se détendit un peu les muscles et balança sa tête de gauche à droite.

-Si vous souhaitez discuter je vais vous laisser, dit elle en amorçant un mouvement de recul.

Mais Schneizel avait déjà proposé à Key qu’il le laisse se reposer. Ciara fut soulagée. Elle pourrait enfin parler à son ami. Elle jeta un rapide coup d’œil à Alys, toujours à l’écart et de marbre. Peut être serait il bon de la laisser avec Key afin qu’elle s’excuse auprès de lui. Ciara pensait bien qu’elle n’avait pas vraiment envie de le faire devant elle et Schneizel. La Dominante ne prit même pas la peine de lui poser cette si simple question, et elle se rapprocha finalement de Schneizel pour lui poser une main amicale sur l’épaule. Approchant ses lèvres de son oreille, elle lui adressa quelques mots :

-On pourrait aller discuter, qu’en penses-tu ? Je ne pense pas qu’Alys s’attaquera de nouveau à lui, elle est assez mal de l’avoir fait une fois… Ils doivent mettre les choses à plat.

Sa main glissa de l’épaule du Mercenaire et elle recula d’un pas pour contempler son visage et attendre sa réponse. La Mercenaire acquiesça lorsqu’il lui répondit par l’affirmative puis elle recentra son regard vers l’apprenti alité :

-Rétablissez vous bien. Profitez aussi de ces instants de repos, vous en manquerez dans le futur. Au revoir, Key.

Elle inclina rapidement le chef puis fit volte face et passa devant Alys, à qui elle adressa un sourire bienveillant. Derrière elle, Ciara sentait que Schneizel aussi avait bougé. Suivie par le Mercenaire, elle sortit de l’hospice. Le brouhaha des couloirs grouillant de Mercenaires envahit tel un raz de marée Ciara, dont l’esprit était toujours emprunt de l’atmosphère feutrée du centre de soins.

Sujet: Re: Le calme après la tempête Ven 15 Oct 2010 - 12:09

Le fait que Schneizel évoque sa boucle d’oreille l’avait perturbé et inconsciemment il s’était mis à espérer… quoi ? Qu’une personne qu’il connaissait depuis à peine quelques mois lui révèle tout d’un coup des choses sur sa petite enfance et sa famille ? Ridicule… pourtant il l’avait espéré et la chute fut difficile à amortir lorsque son maître lui dit avoir mal vu. Son masque d’impassibilité sur le visage, il hocha simplement la tête comme si ce qui venait de se dérouler n’avait aucune importance, jolie mensonge qu’il se faisait à lui-même.
Avec un léger sourire il regarda l’homme qui était de quelques années son aînée. Il lui laissait le temps de ce remettre de ces émotions et peut-être d’enfin profiter de son arriver en ces lieux mythique.

« Merci, je crois que je vais rester ici encore un moment, visiter un peu cet endroit en restant sur le chemin que nous avons emprunté, je ne tiens plus à me perdre, les rencontres ici aussi peuvent être dangereuses. Mais je veux bien reprendre la visite demain. »

Sur ce, il vit Ciara s’approcher et glisser quelques mots a l’homme sombre. Les oreilles de Key étaient naturellement affûtées de sorte que rien de ce qu’elle lui dit ne lui échappa. Détournant la tête, il effaça vivement un sourire de ses lèvres alors qu’elle essayait de rassurer Schneizel sur les intentions d’Alys à son égard. Amusé il n’oublia pas non plus de remarquer la main qui glissa de l’épaule de son maître…

« Merci Dominante Ciara, j’utiliserai vos conseils à bon escient. J’espère que nous nous reverrons dans de meilleures conditions. »

La saluant respectueusement, il la regarda partir, suivit de peu par son maître. L’atmosphère changea, il se sentit soudain seul mais libéré d’une forte présence qui semblait le jauger à chaque instant. Le jeune noble, les mains posées de chaque coté de ses cuisses tenant fermement le rebord de la paillasse, ferma les yeux et respira profondément.
Dans l’atmosphère feutré, il entendit soudain un bruissement et se rappela qu’il n’était pas seul dans l’hospice. Dans un brusque mouvement de tête, ses yeux bleu s’ouvrirent et fixèrent Alys qui était resté dos au mur, une jambe légèrement repliée.

Machinalement il porta ses doigts à son tout nouveau bandage. Elle était plus jeune que lui et déjà Dominante. Elle l’avait blessé, c’était énervé contre lui et pourtant elle était encore la alors que les autres, collègues et amis étaient parti. Avait-elle quelque chose à lui dire ? Elle l’intriguait et pour une raison qu’il ignorait et il l’aimait bien malgré tout. Au moins elle était franche, pas comme tous ceux de la cours qui ne pensaient qu’à bien se faire voir par les autorités supérieures.

« Ne me regardez pas avec les sourcils froncés comme ça, j’ai l’impression d’avoir encore fait quelque chose de mal… »

Et voilà qu’il se mettait à faire de l’humour, enfin essayer serai plus juste. Ce point n’avait jamais été son fort, depuis qu’il l’avait comprit il passait plutôt son temps à écouter, regarder et placer de temps à autres des paroles intelligentes. Mais il ne se sentait pas tout à fait à son aise en sa présence et le silence qui habituellement l’apaisait, le comprimait à présent.
Cherchant a remettre un peu d’ordre dans cette situation, il descendit de la paillasse et remit en place ses vêtements tombant toujours impeccablement bien que légèrement froissés par les évènements récents. Key se tourna alors vers la jeune femme, son regard azur fixé sur ses trais fins et gracieux.

« Vous vouliez me parler je présume ? »

Sujet: Re: Le calme après la tempête Lun 22 Nov 2010 - 16:00

Cette histoire de boucle d'oreille, vestige du passé ombrageux de Key, fut vite écartée, laissant un semblant de manque à la Dominante. Sa curiosité ainsi animée demandait maintenant à être étanchée. Mais Alys savait cela impossible désormais. De plus, Ciara et Schneizel commençaient à se mouvoir un peu plus, comme s'ils ne tenaient plus dans cette pièce peu spacieuse, ou du moins pas autant qu'il y semblerait au premier abord.
Les paroles que glissa sa collègue à l'oreille de leur ami n'étaient pas perceptibles. Et, dans un certain sens, cela était mieux ainsi. Ce qu'ils avaient à se dire ne la concernait très certainement pas. Et elle ne voulait en rien se mêler de leur histoire.
Lorsqu'ils se retournèrent dans un bel ensemble et saluèrent Key en lui donnant quelques recommandations, Alys ne bougea pas d'un pouce. Elle ne fit que suivre leur progression de son regard doré, accompagné par un léger mouvement du cou afin de suivre calmement leur progression dans la salle. Un simple clignement des yeux répondit au sourire de son amie. Comme un discret remerciement. Discret, mais sincère.

La porte se referma sans bruit derrière eux. Et le silence imposa alors de nouveau son règne sur les deux protagonistes restants. Un silence presque cruel. Que Key s'empressa aussitôt de rompre. Comme s'il se sentait peu à l'aise en présence de ce sinistre vide sonore qui allait de paire avec les sentiments maussades de la jeune femme aux cheveux ébènes.
Il tenta de la faire rire, mais derrière ces paroles pleines d'assurances, elle crut discerner une gêne. Le doute se lisait dans ses yeux. Et ses gestes instinctifs précédents prouvaient son malaise. Est-elle si mauvaise aux regards des autres? Elle avait peine à croire qu'elle ait put tant changer en si peu de temps. Dire qu'elle s'était crut guérie. Alors quand réalité, elle était tombée dans un piège qui lui lacérer l'âme plus douloureusement que précédemment. Et pourtant, ce piège portait toujours le même nom: Dan...
Qu'importe. Ce n'est pas ça qui aller l'arrêter. Plus rien ne la ferait reculer. Elle avait déjà tout perdu, alors à quoi bon faire la douce afin de masquer ce que les siens savent déjà?

Key, quittant son brancard, se mit face à elle. Non sans soigner sa tenue, pourtant parfaite. Son regard océan trouva celui de la Dominante. Un regard réellement sûr cette fois-ci, sans l'ombre d'une crainte. Malgré elle, Alys ne put s'empêcher de sourire.
Doucement, la jeune femme se tourna vers Key, sa cheville retournant au sol, jambes légèrement écartées. Avec lenteur, tout en décroisant les bras, elle se dirigea vers lui, ne le lâchant pas un instant de ses yeux d'ambres. Ses pas se stoppèrent à moins d'un mètre de lui et, mains sur les hanches, elle se décida, après tant de minutes de silence, à laisser libre cours à sa voix:
- Mes problèmes ne tournent pas qu'autour de toi. Certes, pour aujourd'hui, tu y es pour beaucoup. Cependant je t'offre ce conseil: ce n'est pas parce qu'une Dominante, ou n'importe quel Mercenaire, te fixe d'une étrange manière, que tu as forcément fait quelque chose de mal. Tu es en droit de te remettre en question, c'est vrai, et ce n'est pas une mauvaise chose d'ailleurs, mais ne crois pas être au centre des pensées de ceux que tu ne connais pas.
L'ironie se brisa de nouveau au silence, telle des vagues sur les rochers. Ne pouvait dont-elle pas faire le moindre effort? Au moins pour oublier...
Ses bras glissèrent le long de son corps au moment même où elle poussa un soupir d'exaspération. Contre elle-même:
- Pardonne-moi, mais tu es loin d'imaginer de quoi la vie d'un Mercenaire est faite. Encore moins d'une Dominante. Tu n'es qu'un apprenti, tu ignores ces choses-là. Quoi qu'il en soit, si je suis restais c'est simplement...
Simplement pour quoi? Imperceptiblement, son regard dévia sur le côté. Pourquoi est-elle resté au fond?
- Je... Je ne tiens pas à m'excuser pour ce que je t'ai fait, murmura-t-elle en fixant de nouveau le disciple, De cette manière tu te rappelleras qu'il vaut mieux maîtriser sa langue lorsque l'on est dans l'ignorance. Et surtout sur un territoire dont on ne sait rien. Cependant, Schneizel te l'apprendra mieux que moi, l'on peut mettre un terme à ce manque de connaissance en s'informant. Et le plus simple, c'est de poser des questions au principal concerné.
Posant délicatement ses mains sur le rebord de la paillasse, elle se souleva habilement afin de s'y assoir en douceur:
- C'est pourquoi je te pose celle-ci: Qui es-tu?

Sujet: Re: Le calme après la tempête Mar 30 Nov 2010 - 10:12

Il la regardait, bien droit, s’avancer vers lui et s’arrêter dans une posture qui lui rappelait étrangement une mère faisant des remontrances à son enfant. C’était peut-être le cas : la Dominante et l’apprenti. Le ton qu’elle employa n’était pas si loin que ça de cette réalité.

A peine eut-elle ouvert la bouche qu’il mesura la bêtise de son humour. Il en avait déjà trop fait pour la journée à se rebeller contre elle et à en subir les foudres. Il en avait payé le prix et retenu la leçon de ses erreurs. Mais même s’il la respectait, il n’appréciait pas d’être pris de haut comme cela. Que croyait-elle donc ? Avec ce qu’il avait déjà vécu, les recherches menées sur les Mercenaires et ce que lui avait enseigné Schneizel, il savait qu’il n’était qu’au début d’une longue route, néanmoins, il n’était pas né de la dernière pluie et se voir rabrouer à la première occasion l’agaçait.
Soupirant intérieurement, il la fixa sans ciller. C’était sa voix de commandement, de dominante qu’elle utilisait. Il se demanda si une autre facette existait chez cette étrange créature. Adossé contre la paillasse, il hocha simplement la tête quand elle s’excusa. Quoi dire de plus, il ne lui revenait pas le droit de choisir, seulement de les accepter. « Tu n’es qu’un apprenti » : cela confirmait ses dires intérieurs.

Tandis qu’une brève hésitation passait dans sa voix et qu’elle fuyait son regard, il inclina légèrement la tête, un sourire voulant percer le coin de ses lèvres. L’espace de quelques secondes, il avait cru voir les rôles s’inverser et à présent, il ne se sentait plus aussi petit que ça devant l’autorité qu’elle représentait.
Elle continuait à lui donner des leçons, Key préférait voir ça comme des conseils. Et bien qu’il connaisse ce sujet mieux qu’elle, avec son expérience de la cour de Dénaros, il la laissa continuer. Une lueur d’amusement dans le regard, ses yeux pétillèrent quand elle voulut s’intéresser à lui. Voilà qui lui donnait l’occasion d’utiliser ses acquis.

« C’est une question bien vague que vous me posez là. Je ne suis, comme vous l’avez si bien dit, qu’un apprenti. Mais si vous voulez quelques détails de plus sur ma personne, cela ne sera pas gratuit. Et n’essayez même pas de faire valoir ce droit avec votre rang. Mon histoire m’appartient. Vous pouvez toujours vous informer, vous ne saurez jamais vraiment qui je suis avec des bouts de papiers. »

La tête légèrement inclinée, les bras croisés sur son torse, il parlait sur un ton neutre. Il ne jouait plus la carte de l’humour et il se savait trop bas dans la hiérarchie pour s’imposer une inflexion pompeuse. Cependant, il avait parlé avec cette voix qui montrait qu’il maîtrisait son sujet et qu’il ne lâcherait rien. Une voix qu’on ne pouvait dire amical, mais elle ne frôlait pas non plus l’insubordination. Une voix calme, posée, démontrant toute la confiance que Key avait en lui. Il connaissait parfaitement ses compétences.
Se redressant, il tourna la tête dans sa direction pour croiser ce regard d’ambre aux mouvances à la fois si glaciales et si chaudes. Assise sur la paillasse, elle était presque aussi grande que lui. Presque. Elle exerçait sur lui toute son autorité, mais c’était lui qui menait le jeu à présent. La balle était simplement dans son camp, à elle de voir ce qu’elle allait en faire.

« Maintenant si vous trouvez ça assez équitable pour vous. Voici mon prix, qui, je suis sur, ne dépassera pas le vôtre… Qui es-tu jeune Dominante, Alys Dylamir ? » Dit-il en passant au tutoiement pour la première fois depuis leur rencontre.

Le bleu se mêlait à l’or de son regard, renvoyant naturellement leurs reflets respectifs dans leurs prunelles. Il se posait beaucoup de questions sur les yeux qui le fixaient. Que voyaient-ils de lui, que croyaient-ils voir ? Un nobliau bien trop prétentieux qui ne connaît rien de la vie, sans doute. Mais pourraient-ils voir plus loin que cette surface trouble… Key commençait à trouver tout cela fort intéressant.

Sujet: Re: Le calme après la tempête Mar 11 Jan 2011 - 16:01

Contrairement à ce qu'elle avait vainement espéré, Key ne se laissa pas facilement faire. Au contraire. Il refusait de se dévoiler plus qu'il ne l'était déjà. De ce fait, une grande part de sa personne restait dans l'ombre. Et elle ne savait de lui que ce qu'elle avait put entendre et voir de ses actes. En autres, ce qu'il voulait bien montrer de lui. Quoi penser d'un homme, un inconnu, que l'on avait blesser involontairement et dont on ne savait rien?
Cependant son comportement était, en y repensant, bien normal. C'était-elle elle-même déjà confier entièrement à quelqu'un? A part Selana, personne, pas même Ciara qu'elle connaissait si bien, ne savait tout sur elle. Elle détestait que l'on sache ce qu'elle avait été par le passé. Elle haïssait cette face de son histoire même. Alors, comment lui en vouloir de vouloir garder ses secrets bien à lui?

Penchant la tête sur le côté, elle dévisagea Key, scrutant ses traits, les émotions qui pourraient le tromper. Mais il y avait toujours ce même air déterminé et parfaitement sûr. Il prenait de nouveau confiance en lui. Tant qu'il en vient à lui retourner sa propre question.
Sourcillant un instant, elle dû maitriser une légère montée de sa colère. En plus de son questionnement et attitude si parfaite, il commença à la tutoyer. Ce comportement, Alys le connaissait bien. Galaad avait eu le même, comme d'autres avant et après lui. La tutoyant, la défiant sans cesse, mettant à bout ses nerfs et n'obéissant jamais à ses ordres. Pourtant, étrangement, elle avait grandement apprécié l'apprenti de Ciara. Peut-être parce qu'il était un peu comme elle...
Passant sa langue sur ses dents, elle se mit en tête de se méfier de Key. Non pas qu'il puisse être dangereux, mais plutôt gênant. D'ailleurs elle se comportait bien trop étrangement avec lui. A la fois avec une impulsivité rageante et une compassion bien trop grande. Mais peut-être qu'elle ne voyait pas les choses dans le bon sens.
La Dominante ferma les yeux un moment.

Tapotant de l'ongle sur la paillasse en déviant son regard, elle fit mime de réfléchir, bien qu'elle sache précisément ce qu'elle allait lui répondre. Elle parcouru des yeux une partie de la salle le regard dans le vague quelques temps, puis, décidée, elle cessa sa petite improvisation rythmée.
Il fixait encore sur elle ce regard digne et fier. Et la guerrière sentait naître en elle un tout autre sentiment que la colère qui avait semblé la gagner quelques temps plus tôt. Elle se mit en tête que, peut-être, il y aurait plus à gagner si elle laissait libre cours à ce nouvel élan.
Poussant sur ses avant-bras, Alys fit un peu petit bond pour revenir sur ses pieds, quittant la paillasse dans un mouvement fluide. En touchant terre, ses bottes ne produisirent qu'un petit claquement à peine audible, et ses cheveux, qui volèrent un instant, reprirent docilement leur place sur ses épaules et dans son dos. Lentement, elle fit un pas dans la direction de Key et, avec une irréprochable délicatesse, lui repoussa du dos de la main de longues mèches ténébreuses de son oreille.
Elle s'y pencha et murmura du bout des lèvres un ton doucereux:
- Non, je ne me livre qu'aux gens de confiance. Et pardonnes-moi, mais jusqu'ici j'ai toutes les raisons de ne pas te l'accorder.

Elle se retira, faisant légèrement tressauter la boucle d'oreille de l'apprenti du bout du nez. Retirant sa main de sa chevelure, elle vint par inadvertance frôler le bandage de son cou dans le même mouvement. Pour autant, ce geste restait assez doux pour ne lui causer aucune douleur. Lui faisant à nouveau face, la Dominante lui adressa un sourire de défi et un rapide clin d'œil, auquel elle-même ne s'était pas attendu :
- Prouves moi donc ta valeur et peut-être que je ferais un effort te concernant.

Penchant la tête sur le côté, son sourire mesquin s'étirant légèrement, elle ajouta:
- Ou bien répond tout simplement à ma question.
Il n'avait qu'à choisir entre facilité et défi. A moins qu'il ne se souhaite se dérober. Par peur du risque à prendre peut-être.
Quoi qu'il en soit, elle aimait ce regard qu'il lui adressait. Elle l'aimait tant qu'elle lui faisait écho, une note de malice en supplément.

Sujet: Re: Le calme après la tempête Mar 24 Jan 2012 - 23:27

L’attente était longue et le silence s’était installé, interrompu par intermittence par doigt de la Dominante. Sa question lui posait problème de toute évidence, il l’observa tendit qu’elle fermait les yeux. Elle était bien jeune pour être à la tête d’une organisation comme celle-ci, qu’est-ce qui l’avait promu à ce poste ? Son intelligence, son art du combat ou un maitre bien trop orgueilleux pour laisser la place à un autre que celle qu’il avait formée. La réponse n’était pas écrite sur son visage.
Puis elle se mit debout dans un mouvement gracieux. Key se força au calme tandis qu’elle s’approchait, ne bougeant pas d’un pouce, n’esquissant pas un geste au moment où elle écarta ses mèches, ni quand il sentit son souffle chaud contre son oreille et pas plus quand elle frôla le bandage de son cou. Non il ne bougea pas mais son regard lui en disait long, si elle avait pu le voir à ce moment-là. Agrandies, ses pupilles brillaient avec intensités. Ce n’était pas un jeu nouveau pour lui, les usages de la cour peuvent prendre une tournure surprenante parfois et les jeunes femmes pas encore mariées savent se faire comprendre quand elles le désirent. Mais là l’enjeu était tout autre, ça n’avait rien d’une attitude séductrice, non, c’était un défi, de la provocation. Et cela faisait vibrer son être bien plus que le reste.

Il en aurait presque rit. Il garda bouche close, écoutant avec attention ce qu’elle lui proposait.
Lorsqu’elle en eut fini, il attrapa d’un geste vif la main de la demoiselle. La poigne assez resserrée pour éviter toute fuite, mais pas assez pour lui causer une quelconque douleur, il la releva à hauteur de son épaule. Puis, son regard pétillant fixé dans le sien, il s’inclina jusqu’à déposer ses lèvres sur sa peau d’ivoire. Un effleurement, une caresse et il desserra ses doigts, la laissant libre d’y laisser sa main ou de la retirer.
Avec un sourire il se redressa et ajouta d’un ton charmeur :

« Il me faudra donc me hâter de prouver ma valeur. »

L’air vibra comme le gong touché par le marteau. Le défi était relevé et la tension semblait monter d’un cran.
Détournant enfin le regard, il réfléchit un instant puis revient à elle.

« Occuper plus longtemps cet hospice me semble déplacé, puisque je suis guéri de votre…. » Il laissa sa phrase en suspend. « Hum, Peut-être pourrions-nous sortir de ce lieu aseptisé. Vous m’escorteriez pour la suite de la visite ? »

Un sourire dérida ses traits, sa bonne humeur était revenue et il n’hésitait pas à la taquiner. Non mais quel toupet avait-il de demander à une Dominante de lui servir de guide ! Du toupet, oui il en avait à revendre et après tout pourquoi se priver d’une telle occasion.

Quelque fut la réaction de Key à son petit tour, il n'eut rien de perceptible sur son visage. Seule une neutralité parfaite lui faisait face, accompagnée de cette petite étincelle qu'elle connaissait si bien. Et dont elle aurait dût se méfier.
Contre toutes attentes, et surtout ses attentes, le jeune homme lui saisit la main. Étrange écho d'un acte commis quelque peu auparavant. Calmant les pulsions qui l'assaillirent, elle braqua son regard affuté vers les lèvres de l'apprenti. Lèvres qui s'avançaient avec une lenteur mesurée vers sa peau. Réprimant un frisson, et se contenant comme jamais encore, elle ne fit aucun geste pour l'arrêter. L'aurait-elle put après tout? Il la tenait fermement entre ses doigts, de peur qu'elle s'échappe peut-être. Et ce, non à tord.
Mais qu'est-ce qui l'empêchait de se dégager au juste? La peur de lui faire du mal? Bon sang, mais depuis quand elle se préoccupait de ça? Ça ne pouvait être que parce qu'elle avait blesser Schneizel et qu'elle ne voulait plus revoir cette amertume sur son visage. Il n'y avait que ça!

Avec délicatesse, les lèvres de Key effleurèrent la peau, aussi doucement que s'il n'avait s'agit que du souffle du vent. A peine desserra-t-il la pression, qu'elle se retira hâtivement, amenant sa main vers son buste et la recouvrant de sa jumelle, comme pour la protéger d'une nouvelle menace. Menace? Ce nobliau, une menace? C'est une plaisanterie? Cependant elle était si peu habituée aux arts de la noblesse qu'elle se sentait à la fois troublée et profondément écœurée.

De nouveau, Key lui adressa son sourire, répondant positivement à son défis. Ainsi donc, il recherchait la difficulté. Au moins cela prouvait qu'il n'était pas du genre à se laisser faire. Il ferait sans doute un bon Mercenaire, s'il tenait jusqu'à la fin de sa formation. Le seul soucis était qu'ils jouaient au même jeu, certes, mais avec des règles différentes. Ce qui corsait le tout, et pouvait rendre chaque situation inattendue. Si Alys souhaitait garder l'avantage, si seulement elle en avait réellement un, il lui fallait être davantage sur ses gardes.

Key lui fit soudainement une proposition: quitter l'hospice et visiter le repère. Si elle n'en montra rien, Alys fut tout de même surprise. Il y avait quelques temps de cela déjà, Galaad, l'apprenti de Ciara, avait lui aussi décidé de quitter l'hospice pour arpenter les galeries. Et c'est avec Alys qu'il avait décidé de le faire.
En un sens, ça ne dérangeait en rien la Dominante de servir de guide, au contraire. Elle connaissait le repère comme si elle y avait toujours vécue et avait toujours quelques anecdotes sur certains bâtiments ou galeries, souvent soufflées par quelques Piliers. Mais suite à son escapade avec Galaad, elle s'en était voulut de lui avoir fait découvrir ce que seule Ciara aurait dû lui apprendre. Et au vue de la situation actuelle, et principalement de l'incident précédent, Alys ne voulait pas se permettre de perdre l'amitié de Schneizel.
- Je peux te faire visiter, le temps de te ramener à la chambre de ton maître. Mais sans l'accord de Schneizel, je ne me permettrais pas de te faire découvrir ce qu'il avait sûrement prévu de faire lui-même. Je pense que tu peux comprendre ma décision.

La Dominante s'assura qu'il ait bien comprit avant de poursuivre, un léger sourire aux lèvres:
- Mais une fois arrivés aux dortoirs je pourrais, répondre aux questions que tu poses si tu t'en trouve méritant.
Conservant son sourire, elle se détourna et fit signe à Key de la suivre. Une visite rapide, pourquoi pas, si ça pouvait permettre de se racheter? Se racheter? Décidément elle n'avait pas toute sa tête...

Elle jeta un regard en arrière. Il valait mieux qu'elle reste prudente avec lui. Elle avait vraiment tendance à perdre pied, lorsqu'elle, petite bergère passée gamine des rues, était en contact avec la noblesse. Et c'était ce manque de contrôle sur elle-même qui la rendait si agressive et instable. Quelle idée il avait eut Schneizel de prendre un sang-bleu! Il ne pouvait pas faire comme tout le monde?

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